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Il neige comme dans un film de Leo McCarey (ou de Douglas Sirk ou d’Axelle Ropert)

Les premières chutes de neiges me font penser à trois beaux films : Elle et Lui (An Affair to Remember – 1957) de Leo McCarey, Tout Ce Que Le Ciel Permet (All That Heaven Allows – 1955) de Douglas Sirk et La Famille Wolberg (2009) d’Axelle Ropert.

An Affair To Remember by Nat King Cole

Il neige à ma fenêtre, comme dans un film de Douglas Sirk

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Dans les films de Douglas Sirk, il y a toujours des miroirs et des fenêtres dans lesquels les visages des personnages se réfléchissent. Les plus matinaux, comme Rock Hudson et Jane Wyman dans Tout Ce Que Le Ciel Permet (All That Heaven Allows – 1955), peuvent admirer la neige tomber et recouvrir le paysage.

Alors ce matin, je me sens un peu Rock Hudson.

Deux interprétations de la chanson de Randy Newman :
> Snow, par Harry Nilsson
> Snow, par les Harpers Bizarre

Les secrets de la Famille Wolberg

La dernière fois que nous avions été autant ému au cinéma c’était lors d’une projection cet été de Imitation of Life de Douglas Sirk. Il était également question de famille, de secrets, de départ, de maladie. En revanche était absente la figure du père qui tient dans La Famille Wolberg d’Axelle Ropert, le rôle central. François Damiens campe magnifiquement ce personnage de père-maire qui s’occupe de ses administrés comme s’il s’agissait de sa propre famille. Famille qui d’ailleurs se désagrège peu à peu mais qu’il s’évertue, parfois maladroitement mais avec une sincérité désarmante, à maintenir unie. Dans ce mélodrame bouleversant et gai à la fois, on apprend que l’important n’est pas d’être « dans la vie » ou « à côté de la vie » mais de pouvoir passer de l’un à l’autre. Une définition du cinéma en somme.

> Remove This Doubt, extrait de la BO de La Famille Wolberg, Face B d’un 45 tours des Supremes et véritable mélodrame de poche.

> Love In The Open Air (première escapade en solo de Paul McCartney pour la BO du film The Family Way en 1966)

« Les films de Douglas Sirk libèrent la tête »

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« Peu importe, Godard, Fuller, moi ou un autre, aucun de nous ne peut arriver à la cheville de Douglas Sirk. J’ai vu six films de Douglas Sirk. Parmi eux, il y avait les beaux du monde » (R. W. Fassbinder, Les films libèrent la tête, L’Arche, 1984).

Je n’en ai vu que trois, mais mon constat est le même : les films de Douglas Sirk sont parmi les plus beaux jamais réalisés. « Chef-d’œuvre », « bouleversant » : bien que galvaudés par les critiques, ces deux mots sont bel et bien les seuls à même d’exprimer l’émotion ressentie à la vision de ces films, qu’il s’agisse de Ecrit sur le vent, Tout ce que le ciel permet ou de Le Temps d’aimer et le temps de mourir (un titre qui à lui seul résume le propos de Sirk dans nombre de ses films).

Entre 1953 et 1959, Sirk à tourné sept mélos capitaux. Le dernier d’entre, eux (et le dernier du réalistateur), Imitation of Life (Le Mirage de la Vie), est souvent considéré comme étant le plus beau. Si la réussite d’un film se mesurait aux nombre de larmes versées et du chamboulement émotionel qu’il provoque lors de sa projection, il faudrait alors remettre la palme au Mirage de la Vie.

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Du générique (des diamants qui tombent lentement jusqu’à remplir l’écran tandis que les noms des acteurs apparaissent en surimpression) au carton de fin, chaque image est un véritable enchantement. « J’ai l’impression que les images durent deux fois plus que celles des films habituels, un quarante-huitième de seconde au lieu d’un vint-quatrième de seconde » écrira Godard dans sa critique des Cahiers du Cinéma à la sortie du film. Imitation of Life met en scène des personnages qui butent perpétuellement sur la réalité de la vie et les mirages que celle-ci produit. Chacun essaie de prendre ses désirs et ses envies pour des bien propres. Mais la réalité sociale les rattrape à chaque fois.

Suronommé « le Prince du mélodrame », Douglas Sirk mériterait en fait le titre de Dieu du mélodramme. Un genre cinématographique qu’il su réinventer et dépasser pour le sublimer. Car derrière les films à l’eau de rose auquel on pourrait s’attendre à la lecture des résumés de scénarios, se cache une virulence et une émotion brute emprunt de ce que certains ont pu appeler un « réalisme fantastique ».

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On pourrait parler des couleurs, toujours magnifiques, du choix impécables des acteurs, des décors – dans lesquels les miroirs, les fenêtres et les escaliers tiennent une place prépondérante -, de la neige et des saisons qui passent, du rôle de premier rang que tiennent les femmes dans ses films… On aurait pas plus fait le tour d’une œuvre magistrale et unique.

Les films de Douglas Sirk sont parmis les plus beaux du monde.

Dix ans après la sortie de Imitation of Life, les Supremes enregistrèrent un hommage inattendu à ce film sous le titre I’m Leaving In Shame. Une belle chanson dans la plus pure tradition Mowton dont les paroles font directement référence à l’histoire des personnages de Annie et Sarah Jane.

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