La Fnac a décidé de ne pas attendre les directives de la ministre de la santé et a pris l’initiative de coller un bandeau « www.Manger-Bouger.fr » sur les livre de Rabelais présents dans ses rayons. Le musée d’Orsay a quant à lui ajouté la mention « Manger 5 fruits et légumes par jour » sous chaque tableau de Botero exposé dans ses murs. Enfin, les studio Gaumont ont entrepris un vaste chantier consistant à effacer de ses archives toute image de cigarette. C’est donc une sucette que Delon aura à la bouche dans ses films. Quant à Belmondo, il mordillera désormais un bâton de réglisse. Bref, la loi, toujours la loi, rien que la loi. Et tant qu’on y est, encore plus loin que la loi.
Si ce qui précède n’est pas (encore) à l’ordre du jour, un débat fumeux autour de la fameuse pipe de Jacques Tati enfume les formus. On retrouve en effet sur les affiches annonçant l’expo consacrée au réalisateur de Playtime un Monsieur Hulot affublé d’un moulin à vent jaune dans la bouche, en lieu et place se son éternelle pipe (qui était toujours éteinte !). Ce n’est pourtant pas la loi qui a contraint à cette censure, mais la RATP qui a décidé de prendre elle-même les devants, trop inquiète à l’idée de contrevenir à la loi Evin. Le même Evin qui trouve cette opération Photoshopo-stalinienne totalement ridicule !
Enfin, le fait que cette trahison vise Monsieur Hulot est quelque peu cocasse. Que ce type décalé, léger, insouciant, fondamentalement bon, soit victime de la censure par anticipation renforce aujourd’hui son personnage et nous incite à fuir la crispation ambiante pour nous réfugier dans les salles obscures pour voir et revoir ses aventures.
PS : le Musée d’art du comté de Los Angeles m’informe à l’instant que l’inscription « Fumer Tue » qui avait été rajoutée dans un premier temps sous le tableau « Ceci n’est pas une pipe » de Magritte a été retirée au motif à la fois évident et imparable que ce tableau n’incite pas à fumer puisque, manifestement, il ne s’agit pas d’une pipe.
Précsion : le tableau « Ceci n’est pas une pipe » s’appelle en réalité « La Trahison des images ». Tout juste. Michel Foucault en parle ici. Pour les résistants, une galerie d’images ici.